À Toronto, on diagnostique une forme de dépression chez 150 000 personnes chaque année. C’est l’équivalent de la population de Moncton au Nouveau-Brunswick. De ce nombre, la majorité réagira peu ou pas aux médicaments et thérapies à leur disposition. Ce fait a piqué la curiosité du Dr Z. Jeff Daskalakis qui travaille au centre de toxicomanie et de santé mentale de l’Université de Toronto.

Il a constaté que l’électroconvulsivothérapie (ECT) est un excellent remède aux dépressions graves, quoique le patient doit être anesthésié pendant les séances quotidiennes
de 40 minutes. Grâce à la subvention d’équipe offerte par la Fondation Brain Canada en 2014, son équipe de chercheurs canadiens a mis au point une méthode inédite pour administrer un traitement de stimulation cérébrale de façon moins invasive : la SMTr. La stimulation magnétique transcrânienne répétée (SMTr) est un traitement offert aux patients qui ne réagissent pas aux antidépresseurs. Outre son efficacité, ce traitement ne requiert pas d’anesthésie, contrairement à l’ECT.

(A) capuchon EEG ; (B) stimulation magnétique transcrânienne (SMT) appliquée au cortex ; (C) tracés électrophysiologiques du cortex en réponse à la SMT.
(A) Casque à électrodes pour EEG ; (B) Stimulation magnétique transcrânienne (SMT) du cortex ;
(C) Tracé électrophysiologique du cortex réagissant à la SMT.

Les chercheurs s’intéressent en particulier à un nouveau mode de traitement SMTr baptisé stimulation magnétique transcrânienne répétée (SPTi). La SMTr exige environ 40 minutes, contre à peine trois minutes pour la SPTi. Le réseau canadien de traitement par SMTr et biomarqueurs dans le contexte d’une étude clinique sur la dépression (CARTBIND) est un projet comparant la SMTr classique à la SPTi chez 294 patients présentant une dépression pharmacorésistante. La moitié des patients subit un traitement par SMTr et l’autre moitié reçoit un traitement par SPTi. « L’étude CARTBIND vise à brosser un tableau plus précis des mécanismes cérébraux derrière les effets thérapeutiques de la SMTr lors du traitement de la dépression », explique le Dr Daskalakis.

Les résultats préliminaires de l’équipe sont encourageants, car ils démontrent que la SPTi soigne aussi bien la dépression que la SMTr, tout en étant plus rapide à administrer. Si tout se déroule bien, ce projet jettera les bases d’une méthode pour accroître la capacité de traitement par SMTr, ce qui en facilitera l’accès pour toute la population canadienne. Ultimement, l’efficacité supérieure de la SMTr (l’un des rares traitements en cas de dépression pharmacorésistante) ouvrira la voie à une médecine personnalisée.

Le Dr Daskalakis estime que la Fondation Brain Canada est unique, car elle a été le premier organisme subventionnaire à prendre le risque de financer ses travaux. Grâce à ces fonds initiaux, il a réussi à attirer d’autres capitaux, même de l’étranger, notamment en décrochant une subvention des National Institutes of Health des États-Unis. En effet, certains sites américains utilisent déjà la stimulation magnétique transcrânienne, entre autres pour en vérifier l’efficacité comme traitement du syndrome de stress post-traumatique.