Je m’appelle Alison et je suis responsable de l’évaluation et des projets spéciaux à la Fondation Brain Canada. Mon rôle consiste à évaluer les programmes pour éclairer la prise de décision, ainsi qu’à élaborer des documents conceptuels et des plans d’action en vue de soutenir nos activités stratégiques. C’est un travail stimulant. Mais entre vous et moi, ce que j’aime par-dessus tout, c’est de trouver des histoires d’impact en recherche et d’échanger avec nos chercheurs financés sur les différentes façons dont ils travaillent à améliorer la santé du cerveau.

Ainsi, quand l’occasion s’est présentée de rencontrer une chercheuse financée par la Fondation Brain Canada, une étoile montante de la physique médicale à l’Université de la Colombie-Britannique — mon alma mater — au sujet de son récent voyage en Afrique subsaharienne pour y mener des recherches, je l’ai saisie sans hésiter.

Future Leader canadienne de la recherche sur le cerveau en 2020, la Dre Shannon Kolind est spécialiste d’une technologie appelée imagerie par résonance magnétique (IRM) portable à faible champ. Si vous avez déjà subi une IRM dans le passé, ce terme peut évoquer de mauvais souvenirs, mais sachez qu’il n’en est rien après avoir visité le laboratoire de la Dre Kolind. Ces appareils d’IRM utilisent un champ magnétique très faible — près de 25 fois plus faible que les aimants des appareils d’IRM cliniques, soit à peine plus forts qu’un aimant de réfrigérateur — et représentent environ le cinquième du coût. Grâce aux progrès réalisés dans le domaine des bobines magnétiques et des algorithmes d’imagerie, les appareils d’IRM à faible champ sont assez petits pour passer à travers une porte (à l’exception des portes des vieux bâtiments, qui requièrent parfois certaines modifications comme peut en témoigner la Dre Kolind!) et consomment moins d’énergie qu’une machine à cappuccino. Ils sont également faciles à utiliser et peuvent être employés par des non-spécialistes. Autrement dit, si vous n’avez pas de technologue en IRM hautement qualifié sous la main, pas de problème : aucune formation spécialisée n’est requise pour faire fonctionner l’appareil.

La Dre Kolind et son équipe de recherche, dont Neale Wiley (à droite), un technologue en IRM entièrement formé et certifié.


Et comme me l’a expliqué la Dre Kolind, les appareils d’IRM à faible champ sont toujours en mesure de produire d’excellentes images utiles sur le plan clinique. L’accessibilité de cette technologie, tant dans les hôpitaux et dans les régions éloignées, pourrait changer la donne dans un système de santé qui doit réduire ses coûts tout en améliorant la qualité des soins et en sauvant des vies.

« L’appareil d’IRM portable est un outil de dépistage rapide et peu coûteux, qui est complémentaire aux IRM habituelles, explique la Dre Kolind. Il démocratise l’accès aux soins en uniformisant les règles du jeu, afin que plus de patients puissent en bénéficier pour obtenir un diagnostic et un traitement appropriés. »

L’équipe de la Dre Kolind a été l’une des premières au Canada à obtenir l’un de ces appareils. Aujourd’hui, son équipe travaille à l’optimiser à différentes fins. Autrement dit, elle élabore des instructions qu’elle transmet au dispositif pour l’aider à détecter certaines fonctions cérébrales. Les travaux de la Dre Kolind subventionnés par la Fondation Brain Canada portent sur la mise au point de protocoles de détection et de surveillance de la progression des lésions cérébrales, qui sont caractéristiques de la sclérose en plaques (SP). Grâce au financement de la Fondation Bill et Melinda Gates dans le cadre du projet UNITY (Ultra-Low field Neuroimaging In The Young), la Dre Kolind et son équipe développent également des protocoles pour étudier l’effet de la malnutrition sur le développement du cerveau et évaluer l’efficacité des interventions dans les pays à revenus faibles et moyens. Quand on lui demande si ces projets sont liés, la Dre Kolind acquiesce sans réserve.

« Absolument. Les résultats sont différents, mais les protocoles que nous mettons au point et les apprentissages que nous tirons de nos recherches axées sur la SP s’appliqueront au projet UNITY, et vice versa, explique-t-elle. La principale différence tient au fait que les hôpitaux de pays comme le Malawi, le Kenya et l’Ouganda sont à l’extérieur, ce qui peut compliquer le transport de l’appareil d’IRM pour l’apporter à destination. »

La Dre Kolind bénéficie d’une solide équipe qui travaille à ses côtés pour relever ces défis. Il y a entre autres l’étudiant au doctorat Adam Dvorak, qui s’est rendu avec elle en Afrique subsaharienne, et des collaborateurs industriels d’Hyperfine Inc., la société américaine responsable de la fabrication et de l’amélioration continue de l’appareil d’IRM. Comme l’a expliqué la scientifique clinique et ingénieure biomédicale du laboratoire Hyperfine Inc., la Dre Megan Poorman, c’est une relation mutuellement bénéfique. La société fournit à la Dre Kolind et à son équipe des outils de recherche, et en retour, la Dre Kolind fournit à Hyperfine Inc. des données issues de leurs scans afin que la société puisse améliorer son logiciel.

Les étudiants énergiques de l’équipe de la Dre Kolind apportent leur expertise en physique, en neurosciences, en neurologie et en informatique. L’un d’entre eux est Neale Wiley, un technologue en IRM entièrement formé et certifié qui connaît tous les tenants et aboutissants de l’imagerie dans une optique de soins de santé. J’utilise le terme « énergique » pour décrire son équipe, car dans cette pièce où ils se trouvent avec l’appareil d’IRM, l’enthousiasme de travailler les uns avec les autres et de faire progresser leur science est palpable.

Des chercheurs et cliniciens à Blantyre, au Malawi, l’un des premiers emplacements à utiliser un appareil Hyperfine Inc. dans le cadre du projet UNITY, aux côtés de chercheurs invités de l’UBC et du King’s College de Londres, de représentants d’Hyperfine Inc., de la Fondation Bill et Melinda Gates et de l’International Society for Magnetic Resonance in Medicine.


« La subvention Futurs leaders m’a donné un énorme coup de pouce sur le plan de la productivité, explique la Dre Kolind. Elle m’a permis d’embaucher les personnes dont j’avais besoin pour développer mon programme de recherche — et le faire avancer. »

Depuis l’obtention de sa subvention en 2021, la Dre Kolind a :

  • reçu du financement supplémentaire pour poursuivre sa recherche, notamment une subvention de 90 000 $ du Michael Smith Health Research BC pour soutenir le Dr Hanwen (Kevin) Liu, boursier postdoctoral, à explorer les approches d’apprentissage automatique avec l’appareil d’IRM ;
  • procédé à l’embauche de 10 membres de son équipe (étudiants de cycles supérieurs, assistants de recherche et techniciens) pour travailler à ce projet, dont trois sont soutenus par les fonds de sa subvention Futurs leaders ;
  • réalisé 19 présentations, dont plus de 40 % ont été présentées par des stagiaires, et plusieurs d’entre elles ont nécessité des déplacements rendus possibles par la subvention ;
  • établi une douzaine de nouvelles collaborations, y compris la création d’un nouveau groupe de travail international qu’elle a codéveloppé et qui réunit des experts en IRM à faible champ au sein de la North American Imaging in MS Cooperative (NAIMS). Le Dre Kolind a également développé des collaborations avec des groupes étudiant les troubles de l’humeur, les accidents vasculaires cérébraux, le paludisme, l’encéphalopathie, la maladie d’Alzheimer, les maladies motoneurones et plus encore. Elle espère étendre ses recherches à un large éventail de lésions et de conditions neurologiques.
  • assumé le rôle de coresponsable pour le groupe de travail sur l’imagerie de CanProCo, une plateforme financée par la Fondation Brain Canada qui vise à améliorer la collecte de données sur la SP et à mieux comprendre les facteurs qui interviennent dans la progression de la maladie. La plateforme a recruté près de 950 personnes atteintes de SP dans cinq cliniques canadiennes spécialisées. Des analyses sont en cours pour caractériser la cohorte de façon exhaustive et se préparer à des analyses longitudinales qui auront lieu à mesure qu’un plus grand nombre de participants effectueront des visites de suivi. 
  • élaboré une série de sondages à l’intention de divers intervenants, y compris des soignants et des cliniciens, qui seront distribuées pour solliciter des commentaires sur l’utilisation de l’IRM à faible champ pour la SP.

« Il est encore tôt pour amener ce système au chevet des patients et le déployer dans les communautés isolées, mais c’est notre objectif. Nous mettons nos protocoles à l’essai et nous obtenons des résultats, et notre travail suscite beaucoup d’intérêt. J’ai eu des conversations avec plusieurs autorités sanitaires au sujet de l’utilisation de ces appareils d’IRM en pratique », affirme la Dre Kolind. L’hôpital général de Vancouver, par exemple, a récemment fait l’acquisition d’un appareil d’IRM portatif pour tester son utilisation dans l’unité des soins intensifs. Ces dispositifs sont particulièrement utiles pour les personnes claustrophobes ; comme il faut simplement placer la tête dans l’appareil, le faible champ magnétique permet un balayage plus rapide, rendant l’expérience beaucoup plus agréable. Le Dre Kolind aide à former le personnel à cette technologie et à déterminer la meilleure façon de l’utiliser dans ce contexte.

o La Dre Kolind explique les tenants et les aboutissants de l’IRM portable à notre responsable de l’évaluation et des projets spéciaux, Alison Palmer.


Je suis dans la salle pendant que l’équipe de recherche essaie un nouveau protocole sur un patient test. L’appareil émet des bips de longueurs et de fréquences différentes. Les membres de l’équipe écoutent attentivement, fixant leur écran d’ordinateur qui affiche les instructions qu’ils viennent de donner à l’appareil. L’imagerie cérébrale commence à prendre forme. Ils savent ce qu’ils doivent entendre sur la base de ces instructions. Je leur demande s’il leur arrive de rêver à ces sons (je suspecte que c’est ce qui pourrait m’arriver ce soir!). Ils rient, mais ne disent pas non.

Plus sérieusement, je demande à la Dre Kolind ce qui la motive.

« En fait, je n’ai jamais suivi de cours de biologie, admet-elle. La médecine ne m’intéressait pas. C’est trop fastidieux! Mais quand ma grand-mère a reçu un diagnostic de démence, la possibilité d’appliquer ma formation en physique à l’imagerie pour voir ce qui se passait dans son cerveau a changé la donne ».  

«Dans le cas de la SP, la plupart des gens ne reçoivent leur diagnostic qu’à un stade avancé. L’IRM à faible champ promet de faciliter le dépistage précoce. Il sera également plus facile de suivre la progression de la maladie. C’est vraiment gratifiant de travailler sur une technologie qui pourrait faire une différence aussi majeure dans la vie des gens. »


J’opine de la tête. C’est aussi très gratifiant de financer une recherche aussi importante.

La Dre Shannon Kolind est lauréate de la bourse Futurs leaders canadiens de la recherche sur le cerveau. Elle est professeure associée et directrice associée (recherche) à la division de neurologie du département de médecine de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC), membre du Centre Djavad Mowafaghian for Brain Health et de l’ICORD, et physicienne en IRM à l’UBC MRI Research.